La légende suivante m'a été contée par Dame Zahrâ et je vous la retranscris à l'écrit telle qu'elle a été dite.
La Liche,
L'histoire que je vais vous conter est ancestrale et puise son authenticité dans les légendes populaires des Monts Niarkal. Vous n'êtes pas obligé de me croire, mais ce que dit mon récit est pour moi une vérité.
Tout commença un soir de pleine lune, aux abords du rivage de Coronaissan.
Cette ville, aujourd'hui bien développée, n'existait point à l‘époque. Le bord de mer semblait aux habitants fort lointain, car aucune route n'y menait. Les Niarkalimontais ne se rendaient alors que très occasionnellement sur les plages.
Aujourd'hui, seules les légendes comblent notre méconnaissance de cette partie de l'histoire des monts. Mon récit se réalise à une époque qu'aucun d'entre nous n’a pu vivre. Il est antérieure à toute notre connaissance, qu'elle soit de la mémoire, ou de nos poussiéreux grimoires d'histoires…
Jadis, des hommes vivaient ici, en marge du Cybermonde, bien avant que les Lepreux ne viennent en cette contrée. La peuplade qui composait la population des Monts était sanguinaire et scindée en deux clans. Les Niarkalinontais de l'époque s'entre-déchiraient dans de terrifiants combats bipartites. Deux grandes familles donc, guerroyaient ainsi : les Lichardes et les Surkhones. Alors que les Lichardes étaient de puissants sorcier maîtrisant parfaitement les arcanes magiques, les Surkhones se dépassaient dans l'art de manier les armes et se caractérisait par une force animale. Les deux familles s'opposèrent durant des siècles… et des siècles… oubliant même les raisons initiales de leurs mésententes. Une seule chose comptait, la destruction de l'autre.
Passant sur les détails de leurs innombrables batailles, la victoire finale fut celle des Surkhones. Le dernier affrontement fut des plus sanglants. Il semblait que d‘ordinaire, le nombre de blessés et de morts poussait toujours l‘un des deux groupes à la retraite. Néanmoins, ce fameux jour empli de lassitude d’un combat millénaire, personne ne cédait, jusqu’à ce que tout les Lichardes soient enfin tombées… enfin presque tous. On dit qu'il était facile de repérer les corps malgré le relief prononcé de la région, car chaque emplacement de cadavre était marqué par une présence noir et funeste dans le ciel, celle des Corbeaux Charognards.
Azoudole, le Maître des Surkhones était un homme d'honneur (malgré tout). Il admirait le glorieux combat que lui et ça famille venaient de remporter. Un genou à terre, les derniers Lichardes, le patriarche fut sauvé par la clémence de son adversaire Azoudole, puis condamné à l'exil. Embarqué avec une rame dans un cercueil, le sien semblait-il, il fut donné à la mer.
La glorieuse victoire d’Azoudole fut célébrée en érigeant une tour majestueuse dans les montagnes. On dit que ces mots furent ainsi prononcés : « Que cette tour me serve à observer dans le lointain des abysses maritimes mon ennemi de toujours qui s‘éloigne. »
De son coté, sans nourriture, le Licharde dépérissait doucement, perdu sur l’onde azurée de la mer des Cinq Pics. Le vieux Sorcier allait mourir, laissant derrière lui un siècle de guerre. Mais pouvait-il se résigner à cette fin ? Il savait que malgré son état physique très faible, le sacrifice de son psychique lui serait suffisant pour utiliser une dernière fois ses pouvoirs. Il décida de creuser son âme, de la détruire, au profit d'une réincarnation sommaire et abominable.
La chose qui naquit ce soir là n'était plus humaine. Seule l'animalité macabre et le goût de la vengeance silencieuse subsistaient à l'intérieur de cette créature.
Ce fut un soir de pleine lune que sur la plage, une étrange embarcation accosta. Le calme pesant dans l'atmosphère s'était paisiblement installé à mesure que les jours et semaines de victoire s‘égrainaient. Une nuit pas comme les autres : le vent, la mer, les feuillages, toute la nature était en alerte. Sur le passage de la créature la vie dépérissait à vu d‘oeil.
Sa vengeance fut rapide, affreuse et sans compassion. Les hommes qui l'affrontaient se transformaient en mort-vivant moribond, à l'image du Licharde. La créature monta un à un les cents niveaux de la haute tour, laissant derrière elle une horde d'hommes zombifés, entre la vie et la mort.
Arrivait au sommet il trouva Azoudole, dernier des siens. Un combat frénétique s'engagea, mais malgré les forces et intelligences de combat que pouvait développer le Surkhone, il ne pouvait terrasser l’immortel adversaire .
Et ce n'est point dans la mort que furent endurées les plus atroces souffrances. La créature Licharde, enchaîna son adversaire, au sommet du Donjon, le torse fendu et ouvert
Les Corbeaux, qui de ce combat furent les vainqueurs, ripaillaient comme des rois, se délectant des chaires tièdes du guerrier. Les becs acérées des sombres oiseaux se gorgeaient de sang.
Il semble que la morale ce cette histoire soit à l’avantage des oiseaux de mauvaise augure, qui à défaut de prendre parti dans la guerre des hommes, ont fait bonne pitance…